Le télétravail en période de crise sanitaire

Alors que les
négociations entre le patronat et les syndicats pour la conclusion d’un accord
national interprofessionnel (ANI) sont en cours sur les conditions du
télétravail, le nouveau protocole sanitaire national a fixé le recours au
télétravail comme une mesure phare permettant à la fois de poursuivre
l’activité économique et d’assurer la protection de la santé et la sécurité des
salariés.

Dans le contexte de
la crise sanitaire, le télétravail n’est donc plus simplement
« recommandé », il est devenu la norme dans les entreprises pour
les salariés pouvant effectuer leurs tâches à distance.

Le Ministère du
travail, dans une instruction du 3 novembre 2020, a par ailleurs détaillé les
modalités de contrôle de l’inspection du travail en matière de respect du
protocole sanitaire et du télétravail. En parallèle, son question-réponse a été
mis à jour le 17 novembre dernier.

Nous vous proposons de revenir sur les principales questions relatives à la mise en place du télétravail.

1 Le recours au télétravail :

  • Quels sont les postes pouvant être mis en télétravail ?

Le Ministère du
travail propose une méthode en trois étapes pour identifier les activités
pouvant être mises en télétravail :

  • Etape 1 : Lister les
    principales activités pour chaque fonction ou métier et identifier les
    activités qui ne sont pas prioritaires habituellement mais qui pourraient avoir
    une valeur ajoutée à la sortie de la crise (préparation de support de
    travail, mises à jour de procédures, etc.
    ) ;

  • Etape 2 : Evaluer les
    freins ou difficultés éventuelles au télétravail pour chacune de ces activités pour
    l’entreprise, le client et le télétravailleur (accès au serveur à distance,
    qualité du réseau, qualité du réseau internet, etc.) 
    ;

  • Etape 3 : Identifier si
    des moyens et conditions peuvent être mis en place pour lever ces difficultés.

Les salariés
concernés doivent être associés à cette démarche d’identification des
paramètres facilitant ou bloquant le recours au télétravail.

Cette identification
pourra être formalisée sous la forme d’un tableau ou compte-rendu, établi avec
les salariés concernés. Ce document pourra justifier la mise en place ou non du
télétravail en cas de contrôle.

  • L’employeur peut-il refuser le télétravail à un salarié ?

OUI ET NON, cela dépend des
activités.

L’employeur doit
identifier les postes pouvant être mis en télétravail, selon la méthode suivante :

  • Si aucune solution
    technique et organisationnelle ne permet la mise en place du télétravail pour
    le salarié, l’activité pourra se poursuivre sur le lieu de travail,
    conformément aux préconisations contenues dans le protocole national pour
    assurer la santé et la sécurité des salariés (voir notre actualité du 30
    octobre 2020
    ) ;

Concrètement, un
employeur refusant la mise en place du télétravail doit pouvoir le justifier
par des éléments objectifs.

  • Dans le cas
    contraire, le télétravail devra être mis en place. L’employeur ne pourrait alors
    refuser au salarié le recours au télétravail.  

  • L’employeur peut-il imposer le télétravail au
    salarié ? 

OUI. En effet, le Code du travail mentionne le risque épidémique comme
pouvant justifier le recours au télétravail sans l’accord du salarié et sans
formalisme particulier.

Rappelons qu’en dehors de ce cas, il est possible de recourir au
télétravail en application :

  • D’un accord collectif (de branche, d’entreprise, d’établissement ou de groupe) ;
  • A défaut, d’une charte élaborée après avis du CSE, s’il existe ;
  • En l’absence d’accord collectif ou de charte, d’un accord écrit entre chaque salarié concerné et l’employeur.

2 La mise en place du télétravail

  • Quelles sont les conditions de travail du salarié en
    télétravail ?

Le
salarié en situation de télétravail doit respecter les règles habituelles en
matière de durée du travail, et notamment ses horaires de travail. Les droits en
matière de temps de pause, de repos et de durée maximale du travail demeurent également
inchangés.

De
la même manière, le télétravail du salarié ne doit pas remettre en cause son
droit à la déconnexion.

Dès
lors, il est opportun de mettre en place des moyens de contrôle efficients sur
sa durée du travail et ses plages de repos quotidien et hebdomadaire.

  • Quelles sont les dépenses prises en charge par l’employeur en
    cas de recours au télétravail dans le contexte de crise sanitaire ?

Selon
le Ministère du travail, « l’employeur n’est pas tenu de verser à son
salarié une indemnité de télétravail destinée à lui rembourser les frais
découlant du télétravail, sauf si l’entreprise est dotée d’un accord ou d’une
charte qui le prévoit
 ».

En
l’absence de valeur juridique de cette recommandation, il convient néanmoins de
se référer au principe habituel selon lequel les frais engagés par le
salarié pour les besoins de son activité professionnelle
(fournitures,
consommables, connexion internet, forfait téléphonique, chauffage, électricité,
etc.) doivent être pris en charge par l’employeur.

Ce
principe s’applique également pour le salarié en télétravail, même en l’absence
d’accord ou de charte applicable dans l’entreprise.

Le
prise en charge des frais exposés par le télétravailleur peut ainsi intervenir
soit sous la forme d’une allocation forfaitaire, soit au réel, sur présentation
de justificatifs par le salarié.

Parallèlement
à la prise en charge des frais exposés par le salarié, il convient également de
s’interroger sur le versement d’une indemnité de sujétion ou d’occupation destinée
à compenser les frais liés à l’utilisation professionnelle du logement personnel
du salarié.

Cette
indemnité est en principe due lorsqu’aucun local professionnel n’est mis à
disposition du salarié et qu’il est placé en télétravail à la demande de
l’employeur, et ce, même en l’absence de charte ou d’accord d’entreprise.

Or
dans le contexte actuel de crise sanitaire, l’employeur conserve un local professionnel
à la disposition de ses salariés, mais il est fortement incité par le
gouvernement à recourir au télétravail durant la période de confinement.

Dans
ce cadre, et sauf accord collectif ou charte fixant une règle contraire, il
semblerait que l’employeur puisse se dispenser du versement de l’indemnité de
sujétion dès lors que le télétravail a été imposée par les mesures gouvernementales.

Un
éclaircissement serait opportun sur cette question, d’autant plus si le recours
au télétravail « imposé » devait ressurgir à l’occasion des prochains
épisodes pandémiques.

  • L’employeur doit-il prendre en charge les tickets-restaurants
    et titre de transport des salariés en télétravail ?

OUI.

  • Pour les titres-restaurants :
    si les salariés exerçant leur activité dans les locaux de l’entreprise
    bénéficient des titres-restaurant, les télétravailleurs doivent aussi en
    recevoir si leurs conditions de travail sont équivalentes.

  • Pour les titres de transports : l’employeur
    doit prendre en charge 50% du prix des titres d’abonnements (transports publics
    ou location de vélos) souscrits par ses salariés pour leurs déplacements entre
    leur résidence habituelle et leur lieu de travail.

  • Si le télétravail se fait par « alternance »
    (1 ou 2 jours / semaine ; 1 semaine / 2 ; …) : l’obligation de
    prise en charge s’applique sans abattement des jours en télétravail ;

  • Si le télétravail se fait en « continu »
    sur le mois ou la semaine : l’employeur n’est pas tenu à cette obligation.
     

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